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Que faire contre l’Agrostide stolonifère en Agriculture Biologique ?

Actualité19/01/2022Agriculture Biologique, PrairiesBovins lait, Bovins viande

L’agrostide stolonifère fait partie du fond prairial et peut contribuer à améliorer le rendement des prairies dans les milieux très difficiles. Cependant, elle gagne du terrain aussi dans les fertiles pâtures normandes, et pas qu’en Agriculture Biologique.

Quelles sont les raisons de son succès et surtout comment faire pour limiter la présence de cette graminée peu appétente et à faible valeur alimentaire ?

 

Une plante pas comme les autres

Les raisons de sa diffusion sont nombreuses. Il s’agit d’une espèce très rustique qui se contente de contextes pédoclimatiques rédhibitoires pour les graminées fourragères cultivées. Sécheresse et fortes chaleurs estivales, hydromorphie, surpâturage et piétinement font disparaitre les « bonnes espèces » mais pas l’Agrostide, qui au contraire profite de la disparition des autres plantes pour se développer. D’autant plus que, comme l’indique son nom, elle est capable de se propager grâces aux stolons, qui lui permettent de s’ancrer dans les trous autour d’elle.

Elle supporte bien les forts taux de matière organique accompagnés de faibles disponibilités d’éléments minéraux, encore des facteurs qui font reculer les bonnes espèces. Si ce n’était pas suffisant, elle produit des substances dites « allélopathiques », c’est-à-dire qui empêchent les autres plantes de lever et se développer correctement.

Sa valeur alimentaire est moindre, malgré l’épiaison tardive. Aux Etats Unis les semenciers ont développés des variétés OGM résistantes au glyphosate (l’agrostide est une espèce recherchée dans les terrains de golf grâce à sa capacité de former une couverture homogène et à supporter les fauches fréquentes et rases). Les gènes de résistance se sont propagés aux variétés sauvages ce qui fait qu’aujourd’hui elle représente un problème aussi dans les pâturages conventionnels.

Comment limiter sa présence en Agriculture Biologique ?

Il ne s’agit pas de se débarrasser de cette espèce qui fait partie de la communauté prairial normale dans nos prairies normandes. Mais il est important de ne pas la laisser prendre trop de place. Si sa présence commence à devenir problématique, le premier levier consiste à exploiter son point faible : un système racinaire fragile et superficiel. Des passages d’herse étrille en fin d’été permettent d’arracher les stolons pas encore enracinés ainsi que les pieds superficiels et de les laisser dessécher au soleil.

Ensuite il faut travailler sur les causes à l’origine de la prolifération de l’Agrostide. On ne peut rien contre la sécheresse, mais on sait que le surpâturage et le piétinement la favorisent. Il faut donc revoir les pratiques de pâturage pour que les temps de repos optimaux et les hauteurs de sortie soient respectés sur les parcelles infestées. Plusieurs experts conseillent aussi d’alterner la fauche et le pâturage, ce qui permettrait de favoriser les bonnes espèces et d’éviter l’épiaison de l’agrostide. Contrairement au pâturage, la fauche n’est pas sélective et permet de donner de l’air et de la lumière aux graminées fourragères pour qu’elles reprennent leur place.

Attention au sursemis et au resemis

Ces solutions ne sont applicables que si la présence de l’Agrostide est limitée. Il faut donc surveiller son évolution pour éviter de se retrouver avec une infestation trop importante. Si l’Agrostide devient trop envahissante une intervention plus drastique doit être envisagée.

L’importance de l’agrostide peut être estimée par un diagnostic prairial qui permet de recenser les espèces présentes et d’en déterminer la proportion. Dans le cas de l’Agrostide, avec une présence inférieure à 20%, les modifications de pratiques peuvent convenir. Au-delà de 30 %, il faut passer à une solution plus radicale.

Le sursemis est à proscrire. Comme déjà expliqué, l’Agrostide est réputée pour produire une substance allélopathique, qui inhibe la levée et le développement des autres espèces.

La seule solution qui reste envisageable dans le cas d’une prairie très dégradée reste la destruction mécanique en fin d’été, pour un semis de fin d’hiver, dès que les conditions le permettent. Cette pratique, nécessaire pour laisser à la parcelle le temps de s’assainir, est néfaste pour le lessivage hivernal des nitrates et doit être adoptée uniquement en cas d’échec de toutes autres tentatives de redresser la barre. Pour éviter ce problème on peut installer une dérobée à base de colza, radis, trèfle incarnat, d’Alexandrie et squarrosum, qui permettra en plus d’améliorer la structure du sol et contribuer au bilan fourrager en attendant que la prairie soit ressemée.

Il est aussi important, après l’implantation de la nouvelle prairie, de ne pas retomber dans les mauvaises pratiques qui avaient généré le problème. Comme disait Einstein : "La folie, c'est de faire toujours la même chose et de s'attendre à un résultat différent !".

 

 

 

Maddalena MORETTI

Conseillère Référente Agriculture Biologique

maddalena.moretti@littoral-normand.fr  

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