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#1- Autonomie protéique : des éleveurs témoignent

Témoignage17/11/2022Fourrages, Prairies, Technico-économique, NutritionBovins lait

Le projet Cap Protéine a pour objectif souverain de moins dépendre des protéines acheminées des pays tiers grâce à une meilleure valorisation des prairies, l’accroissement des surfaces en légumineuses et le maintien des surfaces en oléagineux.

 

Ainsi, environ 300 exploitations sur toute la France dont 120 fermes pilotes en bovin lait engagées depuis quelques années dans cette démarche d’autonomie en protéine, nous délivre leur parcours, les leviers utilisés et les résultats obtenus.

Dans ce cadre, nous vous présentons le témoignage de 3 éleveurs de Littoral Normand qui ont opté pour plus d’autonomie en protéine à l’échelle de leur exploitation.

 

EARL des Tilleuls (Vincent HUE),

le trio gagnant : pâturage tournant, prairies multi espèces et luzerne

 

Les objectifs de l’éleveur

              « - Avoir et proposer un niveau de vie et un confort de travail optimal pour moi, mes salariés et mes collaborateurs.

                - Optimiser sans augmenter la taille de ma structure.

                - Maintenir une productivité convenable des vaches.

               - Avoir et être une exploitation avec un impact carbone le plus neutre possible. »

 

L’exploitation en bref

             - 1 exploitant (Vincent HUE), 1 salarié et 0,4 apprenti.

             - 81 vaches Holstein – 477 139 litres/an – 5 891 l/VL/an à 41,3 g/l de taux butyreux et 31,8 g/l de taux protéique.

             - Ration type : herbe + 4 kg maïs grain épis + 1kg céréales.

             - 131 ha de SAU – 40 ha à 2 km, 55 ha à 5 km.

             - Exploitation en bio depuis 2014.

L’histoire : un besoin d’autonomie de décision

Vincent s’est installé à 29 ans (en 2003) avec la reprise de la ferme familiale. Au départ, il y avait 90 ha et 430 000 litres de lait avec Benoit, le salarié à temps plein.

Dès son installation, Vincent s’est engagé dans les groupes lait et culture pour comparer et faire progresser ses marges.

Vincent a suivi une formation à la conversion bio en 2008 et a converti l’exploitation en 2014 lorsque la laiterie a été trouvée.

 

L’autonomie protéique et l’impact de l’élevage : un cercle vertueux

  • L’autonomie en protéine de l’exploitation atteint 99% et les 1% achetés sont de la luzerne de France Métropolitaine. Ce niveau est exceptionnel puisqu’en moyenne, les exploitations en Agriculture Biologique se situent à 90% (référence Littoral Normand). C’est un ensemble de leviers cohérents qui a permis d’atteindre ce degré d’autonomie.
  • L’empreinte carbone nette est de 0,55 kg eq. CO2 comparée à la moyenne située à 0,57.
  • Une ferme orientée vers l’herbe participe naturellement à la préservation de l’environnement et de la biodiversité : c’est plus de haies, moins d’intrants (phytos / engrais, carburant…) et du stockage de carbone.
  • L’autonomie vient renforcer ce cercle vertueux.

 

Les résultats économiques : des résultats au vert

  • Le produit lait représente 79% du produit total. Le prix d’équilibre est de 467 €/KL pour un prix du lait à 524 €/KL, soit une marge de sécurité de 57 €/KL. L’EBE/produit est de 38%, il s’élève à 49% hors salariat, ce qui est remarquable. Les annuités/EBE à 55% sont à un niveau tout à fait raisonnable. Il en découle une marge de sécurité (CAF) de 9% des produits par rapport au repère de 5% recherché.
  • Par ailleurs, le taux d’endettement est de 44% ce qui est un niveau très acceptable au vu de la trajectoire de carrière de l’éleveur.  

 

Le travail 

« L’objectif est une bonne qualité de vie pour ma famille, mes salariés et de bonnes relations de voisinage. Je travaille en CUMA et avec mes voisins. Je ne cherche pas à m’agrandir ».

 

Les leviers mis en œuvre pour plus d’autonomie en protéine

Un pâturage tournant et une qualité des prairies suivis de près

Avec une surface de paddocks d’1 ha et une présence des vaches comprise entre 1,5 et 2 jours sur des prairies permanentes productives et qualitatives, le pâturage se fait de mars à novembre avec l’objectif d’obtenir 100% de pâturage dès le mois d’avril et de pouvoir fermer les silos.

Afin de maintenir un niveau de productivité convenable, 5 à 10 % de la surface totale sont rénovés chaque année.

Pour ne pas affecter ses stocks, Vincent n’hésite pas à faucher ses prairies dès la montée à l’épis (même si ce sont de petites surfaces). En réalisant beaucoup de vêlages d’automne, cela lui permet de limiter la présence de vaches sur ses prairies en été et donc de diminuer la destruction de ses pâtures.

 

La création de parcelles de fauche pour augmenter les stocks

Des prairies de RGA, de trèfles blancs et annuels (trèfle d'Alexandrie, incarnat), de fétuque et de trèfle violet sont implantés pour 4 ans. Un objectif de 4 coupes par an permet à l’exploitation d’obtenir des fourrages stockés de bonne qualité du fait d’une fauche même s’il y a peu de volume sur pied.

 

De la luzerne pour valoriser des déficits hydriques

Une implantation de 4 ha de luzerne avec un minimum de 4 coupes/an permet à l’EARL des Tilleuls de sécuriser son autonomie protéique tout comme la production de fourrage lors des périodes sèches.

Avec un objectif d’augmenter la surface à 10 ha afin de s’adapter aux périodes sèches plus longues, Vincent tend donc à pérenniser sa pleine autonomie protéique.

 

Le regard de  Pascal BISSON, conseiller à Littoral Normand

 

Presque 6 500 kg de lait par vache, sans achats !

La démarche de Vincent démontre que l’on peut concilier productivité, autonomie, respect de l’environnement et rentabilité économique dans une pratique encadrée par la bio.

Une grande maîtrise du suivi du troupeau combinée à un savoir-faire en production fourragère permettent de produire un volume de lait étonnant : sur les 3 dernières campagnes, le lait produit par vache atteint en moyenne 6 444 kg de lait au bilan annuel de production laitière du contrôle laitier, contre 5 880 kg pour le groupe bio Prim'Holstein.

Et cela avec une autonomie en protéines de près de 100 % !

 

Pour en savoir plus sur le programme national Cap Protéines : www.cap-proteines-elevage.fr

 

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